Page 13 - Brochure Reynaldo Hahn
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par des peintres – dont l’Américain Thomas-Alexander Harrison –, mais
aussi par quelques Parisiens et des Anglais, qui contraste avec la Bretagne
sauvage et ingrate, peu attirante à leurs yeux. Hahn écrit à sa sœur Maria :
« Cet endroit est, comme nature, admirable, la végétation est riche,
partout des pommiers comme en Normandie, et, en plus, de vraies fleurs
bretonnes, genêts, bruyère, ajoncs dorés. » Ils ne vont cesser de prolonger
ce rare moment de vie en pleine campagne, d’équilibre entre l’intimité
affective et l’allégresse dans le travail, et ne repartiront pour Paris que le
dimanche 27 octobre.
L’année 1896 voit pendant les six premiers mois la dissolution
progressive de leur relation amoureuse. Marcel est à la fois attiré par le fils
cadet de Daudet, le séduisant Lucien Daudet, et pourtant de plus en plus
jaloux de la liberté sexuelle dont pourrait user l’indépendant Reynaldo,
au point d’exiger, tel un Swann possessif en puissance, de tout connaître
de sa vie. Les mouvements d’humeur se multiplient de part et d’autre et
Proust constate au cours de l’été : « je crois seulement que de même que
je vous aime beaucoup moins, vous ne m’aimez plus du tout ». Ce qui
s’avérera faux puisque le sentiment qu’éprouve le musicien à son égard
sera indéfectible, mais allégé de son attachement sensuel.
Portail du château de Réveillon, Madeleine Lemaire, illustration extraite de Les Plaisirs
et les Jours, Marcel Proust, Calmann-Lévy éditeur, 1896