Page 25 - brochure Potocka
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de la rue La Fontaine et les peupliers de la rue Pierre-Guérin
que, tous les jours, le « petit troupeau » de la comtesse, pour par-
ler comme Saint-Simon à propos de Fénelon, est obligé d’aller
trouver l’impérieuse amie qui, n’ayant besoin de personne, se
soucie peu d’habiter une province incommode à tout le monde,
et qui a voulu donner une nouvelle preuve de son dédain de
l’humanité et de son amour pour les bêtes en allant s’installer
dans un endroit où elle se disait qu’aucun être humain ne vien-
drait peut-être, mais qu’elle pourrait soigner ses chiens ; car
c’est ainsi, cette femme qui, dévouée, quand elle est amie, n’en
a pas moins professé toute sa vie le plus complet détachement
de toutes les affections humaines, qui a montré pour l’huma-
nité un mépris de philosophe cynique, doutant de l’amitié, af-
fectant la dureté, raillant la philosophie, cette femme abdique
son impassibilité, humilie sa superbe devant les pauvres chiens
boiteux qu’elle recueille. Pour les soigner, elle est restée un an
sans se coucher. Bien qu’on puisse dire d’elle comme Balzac
de la princesse de Cadignan, qu’ « elle est aujourd’hui une des
femmes de Paris les plus fortes sur la toilette », elle ne s’habille
plus, se laisse, se fait engraisser, ne s’occupant plus que de ses
chiens. Elle se relève d’heure en heure toutes les nuits pour
soigner une pauvre chienne épileptique qu’elle arrive à guérir.
Elle ne sort que pour eux, aux heures où cela leur plaît, comme
la grande artiste son amie, M Madeleine Lemaire, qui n’était
me
allée à l’Exposition qu’une seule fois, « pour que sa Loute ait
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vu la tour Eiffel ». Et parfois, au cœur du bois de Boulogne,
4 Nom de la chienne de Madeleine Lemaire.
Page ci-après : Le Salon de la comtesse Potocka, de Jean Béraud,1887. Parmi les per-
sonnes représentées, on peut reconnaître Édouard Detaille, Henri Gervex, Gustave
Schlumberger, Xavier Charmes, Elme-Marie Caro (bras croisés au fond, à côté de la
comtesse assise) et Béraud lui-même.