Page 15 - brochure Potocka
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romans à clés écrits par des auteurs qu’il n’aime pas, il préfère
se référer à Balzac et à Stendhal, lorsqu’il évoque « Le Salon de
la comtesse Potocka » dans Le Figaro du 13 mai 1904. Tout y
est dit, ou suggéré, de ce qui aurait pu ne pas l’être. Après l’hô-
tel maternel du 14 bis rue Chateaubriand, c’est la maison au
fond d’Auteuil où elle s’est retirée, 41 rue Théophile Gautier,
dont l’éloignement témoigne de « son dédain de l’humanité
et de son amour pour les bêtes », elle dont on entrevoit par-
fois, au Bois de Boulogne, la « blanche beauté » pareille à celle
d’ Artémis. La Comtesse n’a pas dû apprécier que Proust dise
qu’elle « ne s’habille plus, se laisse (aller), se fait engraisser, ne
s’occupant plus que de ses chiens ». La mention de l’héritage
du grand inquisiteur Pignatelli son ancêtre, qui aurait pu la
pousser à conduire ses amies « hérétiques » au bûcher n’a pas
dû plaire non plus à la Comtesse, ni l’évocation de ses farces au
philosophe Caro dans laquelle elle est comparée à la courtisane
Campaspe faisant marcher Aristote à quatre pattes, ni l’éloge
du comte Potocki, ni celle des « caprices magnifiques de cet
être altier et rare ». Il ne manque que les perles. Il y a des éloges
qui tuent.
C’est ainsi qu’elle se froisse de l’article de Proust sur son salon
et rompt avec lui à la grande surprise du journaliste d’occa-
sion, pris entre la flatterie et le souci de la vérité. Il blessera de
même Laure Hayman et la comtesse de Chevigné, mais non la
comtesse Greffulhe, qui ne l’a sans doute pas lu, ni M Straus,
me
qui n’avait aucune raison de se plaindre. C’était le prix à payer
pour inventer M Verdurin, Odette Swann, la duchesse de
me
Guermantes.