Page 22 - Brochure Thomas Alexander Harrison
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                         The Wave, Thomas Alexander Harrison, 1885


          Mais, fondamentalement, c’est le tempérament d’Harrison, l’esprit même
          de  son  art,  qui  influença  la  manière  dont  Proust  traduisit  marines  et
          paysages en métaphores poétiques : « Elstir aimait donner, à se donner.
          Tout ce qu’il possédait, idées, œuvres, et le reste qu’il comptait pour bien
          moins, il l’eût donné avec joie à quelqu’un qui l’eût compris. Mais faute
          d’une société supportable, il vivait dans un isolement, avec une sauva-
          gerie que les gens du monde appelaient de la pose et de la mauvaise
          éducation, les pouvoirs publics un mauvais esprit, ses voisins de la folie,
          sa famille de l’égoïsme et de l’orgueil. » L’accord immédiat de Proust avec
          la position esthétique de Harrison est clair : le renoncement de l’artiste à
          rechercher l’approbation du public et son besoin d’isolement sont essen-
          tiels  pour  créer  les  chefs-d’œuvre  qui  contribueront éventuellement  à
          sa renommée et à lui attirer l’affection et le respect de ses amis. Une
          touche de cette attitude ascétique de défense est exprimée dans une lettre
          d’Harrison datant de 1901 au Philadephia Times, donnant des précisions
          sur sa vie d’expatrié : « Je viens de rentrer de New York et bien qu’y ayant
          peint, je n’étais pas absorbé par mon travail comme je le suis à Paris. On
          ne peut pas s’empêcher d’être affecté par son environnement. Toutes
          les personnes que j’ai rencontrées parlaient d’argent. Même les artistes
          subissaient cette influence et peignaient des choses qui ne leur plaisaient
          pas simplement pour les vendre. En art, il faut travailler par amour et
          non pour l’argent. Je connais un peintre à New York qui a découvert que
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