Page 25 - Brochure Thomas Alexander Harrison
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                       Blue Moonlight, Thomas Alexander Harrison, ca.1900

          Les  observations de  Proust  sur la fascination d’Elstir/Harrison  pour
          les  marines comme  paysages  de  l’imaginaire apparaissent  de manière
          frappante dans le pastel d’Harrison Blue Moonlight. Il utilise le brun de la
          planche (comme Whistler l’avait fait dans ses pastels vénitiens) comme
          partie intégrante de sa composition et, ce faisant, crée une évocation
          picturale ambiguë, où la surface de la mer se lit comme le rivage sablon-
          neux tout en se faisant l’écho du bleu brisé et des tons bruns grisâtres du
          ciel. L’unité multiforme de la fin et des moyens qui en résulte constitue
          une expérience proustienne quintessentielle de la mémoire comme méta-
          morphose au cours de laquelle l’interchangeabilité — et l’interpénétra-
          tion — des symboles visuels harmonisent et simplifient un champ visuel
          complexe. Même l’angle de perception offrant peu d’indices quant à un
          véritable  point  de  vue  fixe,  technique  exploitée  par  Whistler  (et  John
          Lafarge) à partir de son étude des estampes japonaises, était très admiré
          par Proust qui employa alors des perspectives hautes, basses ou retail-
          lées dans ses descriptions séduisantes et déséquilibrées de paysages : « Or,
          l’effort d’Elstir de ne pas exposer les choses telles qu’il savait qu’elles
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